Précédante mise à jour (Arnaud) : mercredi 21/12/2011
Dernière mise à jour (Deckard) : jeudi 27/12/2018
Nouvelle introduction (Deckard)
Ca faisait une éternité que je n'avais pas touché à une page de ce site...
J'en ai profité pour modifier l'url du site de l'entité défunte French
Touch puisque le site d'Arnaud Cocquière n'est
plus accessible sur l'adresse d'origine.
Rappelons qu'Arnaud a abandonné ses activités le 5
août 2017 et avait alors indiqué son souhait de ne pas maintenir le nom de
domaine, qui a fini par disparaitre.
(Puis réapparaitre sans contenu avec un hébergement au Canada...)
Il reste cependant un lien vers une page perso de Free (fournisseur d'accès
internet d'Arnaud).
N'ayant aucune idée de la pérennité de ce site, j'ai décidé de récupérer mon
interview
qu'avait faite Arnaud en son temps, ne serait-ce que
pour le temps passé à répondre à ses questions.
J'avais 2 possibilités: faire un simple copier/coller sans plus-value ou
bien rajouter un petit plus susceptible d'intéresser certains.
J'ai opté pour la 2nde solution.
Je vais un peu parler d'Arnaud et de ce qui s'est
passé pour qu'il arrête de s'amuser avec ses machines.
Je
vais commencer par un aveu!
A ma grande honte, je croyais que Grouik/French Touch
et Blacky/Cochonou Crack Band était la même personne.
Et qu'Arnaud ne faisait qu'héberger les travaux de French
Touch.
Plus étonnant encore, j'ai appris qu'Antoine 'LoGo' Vignau
aussi était aussi tombé dans le panneau!
Arnaud a dû être bien étonné quand il a découvert
notre ignorance.
Pourtant, j'ai été longtemps en contact avec lui.
Je lui avais donné en novembre 2014 le lot de disquettes du Hackerchest
(héritage de The White Man), pensant qu'il serait le
dépositaire de cette page de l'Underground français pendant un bon moment,
compte tenue de sa volonté de maintenir un site sur l'Apple II.
Puis j'ai laché le peu que je faisais encore sur Apple II pour des raisons
professionnelles.
Logiquement, je n'étais plus en contact régulier avec lui.
C'est avec surprise que j'ai lu un message qu'il m'avait envoyé le 29
juillet 2017, message dans lequel il m'annonçait la fin de ses activités de
democoder et la question du devenir du lot Hackerchest.
N'étant pas partant pour qu'elles reviennent chez moi faute de place, les
disquettes de TWM ont atterri chez Antoine
(en croisant les doigts pour qu'elles ne finissent pas sur ebay à une
échéance plus ou moins lointaine).
J'avais convenu avec Arnaud de se voir après les
vacances d'été et c'est ce qu'il s'est passé.
J'ai revu Arnaud le mercredi 20/09/2017 à son
appartement de Boulogne-Billancourt.
Il venait d'officialiser son arrêt d'activité Apple II sur son site quelques
semaines plus tôt et ce fut pour nous l'occasion de descendre quelques
bières spécialement ramenées de mes congés en Auvergne.
Une soirée passée à parler de ruptures...
Les raisons de son arrêt sont multiples et le fruit du murissement d'une
année : cela faisait 12 mois qu'il n'avait rien sorti - sa dernière
production datant d'août 2016.
2016 a été pour lui une année noire.
Tout d'abord du côté de sa vie perso avec la séparation demandée par sa
conjointe en juillet 2016 (ressentiment exprimé pour le temps passé devant
l'Apple II alors qu'elle n'était pas au mieux dans sa vie professionnelle).
Ca nous faisait un point commun de discussion, puisque la rupture avec la
mère de mon fils datait, elle, de 2 mois (juillet 2017).
Il a vécu une cohabitation "forcée" de plusieurs mois (jusqu'en novembre
2016) avec son ex le temps de trouver un nouvel appart près d'un parc pour
le bien être de son chien.
En parallèle, Arnaud a eu un changement
professionnel, dont à priori il se serait bien passé. Etant conducteur de
métro parisien à la RATP, il a subi un changement de ligne et l'affectation
à un autre terminus (début/fin de service).
Cela peut paraitre anecdotique mais Arnaud avait ses
habitudes et un côté casanier qu'il reconnait volontier.
D'ailleurs, c'est grâce à une particularité de son métier (alternance de
grosses journées de travail/jours de repos), qu'il disposait régulièrement
de plusieurs jours d'affilés de congés pour mener à bien des travaux Apple
II.
Bref côté perso, le cocktail séparation / déménagement / changement
professionnel qui s'est fini par la mort de son chien peu de temps après
avoir enmenagé à Boulogne-Billancourt a fortement ébranlé ses envies de
continuer à booter ses machines.
Mais il n'y a pas eu que cela.
Arnaud passait beaucoup de temps à faire des
développements en pensant qu'il en allait de même pour d'autres personnes
pour sortir quelque chose en premier.
Il a fini par se rendre compte que ce n'était pas le cas et l'intérêt s'en
est trouvé amoindri.
On vit tous dans notre bulle. La sienne a éclaté, "aidée" en cela par
certains membres de la "communauté" Apple II.
J'ai toujours trouvé une grande sensibilité à Arnaud (couplée à une modestie
remarquable).
Cette sensibilité exacerbée a été mise à rude épreuve par les interventions
de certains mecs à la sortie de ses productions.
Arnaud n'a pas apprécié les remarques négatives d'un
type en particulier - qu'il m'a cité, un certain Dagen Brock.
Arnaud m'a aussi parlé d'un type qui le saoulait en
faisant - à son avis - beaucoup de buzz... pour une activité de cracking,
personnage qui se la pète par ailleurs : 4am.
Voilà pour les raisons.
J'espère qu'au moins Arnaud se sera bien amusé en
faisant ses démos car c'est bien là l'essentiel.
Vouloir hiérarchiser l'utilité de ce qu'on fait sur ces ordinosaures, à
notre âge, n'a plus de raison d'être.
Faire des animations sur 8 bits, programmer un Flappy Bird ou comme c'est le
cas de Brutal Deluxe, développer des outils
permettant de faciliter la conversion de jeux issus d'autres plateformes
vers l'Apple IIGS : c'est exactement pareil.
Demandez à des gilets jaunes aux fins de mois difficiles ce qu'ils en
pensent.
En relisant l'interview ci-dessous, je suis retombé sur le passage où il me
posait la question sur l'existence de terrains "inexplorés" sur Apple II
(techniques de programmation peu ou pas utilisées, bidouilles matérielles).
Je n'avais pas su quoi répondre.
Arnaud a entre temps bien comblé ce vide puisqu'il a
d'une part sorti des démos (elles sont rares sur Apple II) mais en plus dans
des secteurs jamais abordés.
Certes, cela avait été fait sur d'autres bécanes mais les reproduire sur
Apple II 8 bits était considéré comme impossible.
Arnaud a fait sur 8 bits ce que Zardos
avait exprimé sur IIGS (vu sur une vidéo de Kansas Fest). Il suffisait que
quelqu'un se penche suffisament avec sérieux sur une problématique pour
montrer que les certitudes peuvent s'effondrer.
Pas sur que Grouik soit suivi par quelqu'un d'autre
sur ce créneau pour relever le défi...
Mon 2nd voeu est qu'au moins Arnaud aura pu récupérer
une somme correcte de la vente de son matériel à Antoine,
en rapport avec le résultat des enchères sur ebay qui ont suivi.
Lors de notre soirée, Arnaud m'a indiqué vouloir
continuer dans l'étude des formats musicaux et peut-être produire ses
propres musiques (sur plateforme récente).
Je lui souhaite d'avoir pu mener à bien ses projets dans ce domaine.
Introduction (Arnaud)
Mon premier a interviewé
quelques-uns des plus grands crackers francophones officiant sur Apple II.
Mon second est le webmaster du
site qui reste LA référence sur l'Underground FR de cette époque.
Mon troisième possède une des plus
belles collections consacrée à cette machine en France et mon tout n'a
jamais vraiment lâché son Apple IIe depuis presque 27 ans.
Bien entendu, vous aurez tous reconnu Jean-Marc Boutillon alias Deckard qui
a accepté, à son tour, de se prêter au jeu de l'interview. Et vous allez
voir que, quand il veut, le gaillard peut être très loquace...
Les débuts
Quels furent tes premiers pas dans l'informatique et par quel
biais?
Deckard : D'après Wikipedia, la définition de l'Informatique inclut aussi
les consoles de jeu vidéo.
Avant d'aborder la micro-informatique, mes parents avaient offert à leurs 3
enfants à la fin des années 1970 une console Hanimex TVG 8610 (à moins qu'il
ne s'agisse d'un clone ITMC ?) et je fais partie des "anciens" ayant
commencé à jouer avec PONG sur notre télé d'alors, un modèle en noir et
blanc.
Je pense que mon 1er contact avec un ordinateur date de l'année 1980. Ma
ville de résidence de l'époque, Rueil-Malmaison, organisait une journée
porte ouverte de découverte de l'informatique dans une salle de la mairie.
Le hasard a voulu que je passe par là, les mains dans les poches, et ce fut
ma 1ère séance de tapotage (laborieux) de clavier. Il s'agissait de Bull
Micral dotés d'écrans monochromes en mode texte. Les quelques postes en
libre accès proposaient des petits jeux (type jeu du pendu) et mon baptême
(assez bref) fut donc dans un cadre ludique. C'est surtout l'atmosphère qui
m'avait frappé : des gens discutaient et tout cela avait l'air très sérieux
mais j'avais l'impression qu'ils n'osaient pas toucher les machines. J'avais
pu m'asseoir tout de suite devant un ordinateur en plein week-end. Les jeux
de "démonstration" tranchaient - voire juraient - avec cette ambiance
studieuse orientée "pro".
Puis arriva en 1982 dans le salon familial une console Atari VCS 2600 où se
jouèrent d'interminables parties de COMBAT, DEFENDER et PAC-MAN qui
monopolisaient notre nouvelle télé en couleur.
De 1982 à 1984, l'informatique familiale était en pleine explosion et une
pléthore de machines, la plupart incompatibles les unes avec les autres,
s'offrait au public heureux de s'initier à cette nouvelle discipline. Pour
des raisons principalement budgétaires, le choix familial s'est porté en
1983 sur l'Oric-1 avant de passer à l'Oric Atmos en 1984.
J'étais le seul des 3 enfants à avoir accroché à la micro et mes passe-temps
tournaient autour de notre petite ludothèque d'alors : XENON 1, ZORGON'S
REVENGE, DRIVER, THE ULTRA, MR WIMPY, TYRANN, LONE RAIDER, PASTA BLASTA,
DEFENSE FORCE et d'autres petits jeux issus de la revue Hebdogiciel et
divers bouquins de qualité médiocre regroupant des listings à taper
soi-même.
Les logiciels commerciaux mentionnés ci-dessus n'étaient pas des originaux !
Par le canal des petites annonces de la revue TILT, ma mère (qui
s'intéressait aussi à l'informatique) avait acheté des copies de jeux à un
ado qui, comme beaucoup d'autres à l'époque, se faisait de l'argent de poche
sur le dos des éditeurs.
Je m'en donnais à coeur joie... quand le magnétophone (servant au chargement
des softs mémorisés sur cassettes) ne me décourageait pas par son temps de
lecture interminable et son imprécision provoquant souvent des "FILE ERROR -
LOAD ABORTED" nécessitant de reprendre le chargement depuis le début.
Parallèlement à cela, j'avais appris le BASIC et m'initiais à l'assembleur
avec l'excellent "Manuel de référence de l'Oric-1 / Atmos" d'André Chenière.
Je me rappelle aussi que je lisais attentivement la série d'articles d'Eric
Viel "les pieds dans le plat" de la revue Théoric. L'auteur décortiquait ses
programmes de jeux écrits en assembleur 6502.
J'avais écrit quelques programmes mais avec les bogues contenus dans la rom
de la machine, le rendu ne cassait pas des briques !
Il était par exemple possible de redéfinir le jeu de caractères du mode
texte (pour créer par exemple des sprites en regroupant des caractères) et
afficher le résultat en couleur mais l'affichage était assez pourri : quand
on écrivait un caractère à l'écran, tous les caractères se trouvant sur la
droite passaient dans la même couleur. Infâme...
Pendant l'année scolaire 1983/1984, j'abordai la programmation à l'école via
l'Enseignement Assisté par Ordinateur (EAO).
Le Lycée Polyvalent d'Etat Mixte (LPEM) de Rueil utilisait encore un mini
système en fin de vie, probablement un Télémécanique T1600 avec son télétype
bruyant. Il s'agissait de matériel datant des années 1970 destiné à "
l'expérience des 58 lycées ", le 1er plan d'informatisation des écoles bien
avant le plan plus connu des années 80 (le plan "Informatique Pour Tous").
Sur ces mini systèmes de la taille d'une armoire, on apprenait le LSE
(Langage Symbolique pour l'Enseignement) de type Algol en utilisant de
grosses consoles "design" de couleur orange incluant l'écran et le clavier.
Je me souviens qu'avec la commande "PRENDRE ETAT CONSOLE" du LSE j'avais
piqué à un administrateur un petit programme (TAFAE ?) destiné à faire des
"envois fantômes", c'est à dire permettre à l'enseignant d'envoyer le
programme de son choix sur une autre console. C'était tellement plus drôle
de se bombarder de programmes que d'apprendre ce langage moribond dont je ne
voyais pas l'intérêt, connaissant déjà le BASIC. C'est pour ce mastodonte
que j'avais acheté ma 1ère disquette (une 8 pouces) pour stocker nos
chefs-d'oeuvre impérissables de quelques lignes de LSE (des programmes de
gestion dont seul le prof voyait l'intérêt).
Il y avait aussi dans la salle informatique un Bull Micral mais comme notre
corps enseignant ne le maîtrisait pas trop, il ne fut allumé et utilisé
qu'une seule heure durant toute l'année scolaire.
Quand et pourquoi es-tu passé sur Apple II?
C'est fin 1985 qu'arrive le déclic. Mon copain d'alors, Eric B. (Elrik),
possédait la "Rolls Royce", un Apple IIe doté de deux lecteurs de
disquettes. Quel miracle ces lecteurs comparés à mes galères de chargement
de cassettes de l'Oric. J'allais de temps en temps chez Eric et il me
faisait baver avec ses logiciels.
Après des parties d'Archon à deux, de Conan et des massacres sanglants à
coups de haches avec The Bilestoad, il ne faisait pas de doute que c'était
la machine que je voulais avoir chez moi. J'entamai un travail d'usure
auprès de mes parents pour qu'ils achètent cette machine fort chère à
l'époque (bien qu'étant déjà sur le déclin). Ils finirent par craquer et un
Apple IIe flambant neuf se trouvait sous le sapin du Noël 1985.
Quelle était ta configuration type à l'époque?
Il s'agissait d'une configuration de base. Un IIe 6502 64ko avec écran
monochrome vert et un lecteur de disquette. Ce n'est que plus tard qu'elle
s'étoffa petit à petit d'un joystick, d'un second lecteur de disquette, de
l'extension mémoire pour atteindre 128k, d'une carte parallèle ainsi que
d'une imprimante EPSON LX800.
Et ton utilisation principale de la machine?
Dans la mesure où ce qui m'avait en premier lieu attiré était l'immense
logithèque de cette machine, j'en ai bien entendu largement profité.
Même si j'avais une préférence pour les jeux de rôles (la saga ULTIMA, la
série des QUESTRON, WRATH OF DENETHENOR, les SSI : les PHANTASIE, SHARD OF
SPRING, WIZARD'S CROWN, ...) j'ai dû bousiller plusieurs joysticks sur une
flopée de jeux d'arcade que j'avais collectés. Quelques titres qui me
reviennent (CAVERNS OF CALLISTO, HARD HAT MACK, TIME TUNNELS, SPARE CHANGE,
APPLE CIDER SPIDER, DROL, A.E, LODE RUNNER, SARACEN, les BOULDER DASH, BOLO,
MR ROBOT, CAPTAIN GOODNIGHT, KARATEKA, ...) mais j'ai joué à une myriade
d'autres petits jeux qui ne m'occupaient pas longtemps mais c'était cette
richesse qui était jouissive (passer de l'un à l'autre en un
ctrl-pomme-reset).
J'avais passé une annonce dans le magazine TILT pour des échanges et je me
souviens que mes parents étaient effrayés des proportions atteintes
(plusieurs fois, le facteur est venu en camionnette pour m'amener une
dizaine de gros colis). Ils avaient surtout peur d'une descente de police
car ils avaient entendu qu'il pouvait y avoir des répressions si une liste
d'échange de logiciels manifestement piratés tombait entre les mains
d'autorités de contrôle. Il aurait fallu justifier d'originaux que je
n'avais évidemment pas.
La plupart de ces correspondants n'appartenait pas à l'Underground RTELien
et quasiment aucune de ces personnes n'est restée bien longtemps dans ma
liste de contacts.
L'Underground
Comment es-tu entré dans l'Underground français de l'époque
(au sens large) et à quelle occasion?
Ma collecte de logiciels n'avait pas de périmètre défini, sauf exclusion des
softs de cul existant car j'avais pu booter ceux qu'Elrik avait, du genre
ANIMATED SEX CARTOON ou STRIP POKER, et c'était assez naze (pour le 1er, un
simple flipping des pages HGR1 et HGR2 avec des dessins enfantins).
J'ai donc fini par récupérer quelques disks de l'Underground (il s'agissait
de disquettes de DEPLOMBAGE MODE D'EMPLOI ou de DOC ON THE ROCKS, je ne me
souviens plus).
Ces productions intégraient des messages du type "pour nous rejoindre, rdv
sur le serveur 36-14 ou 36-15 XYZ".
J'ai fini par céder à la tentation d'aller voir à quoi cela ressemblait fin
1987 et ce fut le début d'un emploi intensif du minitel familial (et de
manière cyclique d'un énervement paternel à réception de la facture France
Telecom).
Il y avait plusieurs séries dont Godfather était l'initiateur et il semblait
être un catalyseur important de cet Underground.
Quel type de rôle as-tu tenu au sein de cet Underground au
fil des années ? À quelles productions précisément as-tu participé soit
avec ton ou tes groupes, soit individuellement?
Les contacts récupérés suite à mon annonce sur TILT ne faisaient que du
swapping et jouaient. Sur RTEL, il y avait des personnes qui essayaient de
faire quelque chose de leurs machines, et c'était autrement plus
intéressant. J'ai donc commencé par récupérer ces productions et m'y suis
intéressé, soit en aidant à la traduction/saisie de docs, soit en signalant
un bogue et en donnant le correctif associé. Puis je suis passé à la
réalisation de productions complètes (par exemple un disk de doc d'Ultima V
en V.O., de Wizardy V avec un fast boot) et de petits programmes utilitaires
liés à ce type de freewares, dont certains furent diffusés comme PRODOC (en
plusieurs déclinaisons), ou intégrés à des productions communautaires type
"TOOLBOX".
Dresser l'inventaire de mes participations aux diverses productions de
l'Underground fait partie des tâches inscrites à ma liste TO DO.
J'ai continué à aider d'autres personnes comme moi. Je me souviens de
Stéphane B. (pseudo BOZO) et de son frère David qui écrivaient un jeu de
rôle type BARD'S TALE s'intitulant "A LA RECHERCHE DE KARINE". Je leur avait
fait quelques routines en langage machine alors qu'ils bloquaient sur un
besoin fonctionnel qu'ils n'arrivaient pas à implémenter.
J'ai aussi pris beaucoup de plaisir à faire plusieurs intros/dentros pour la
série des LANGUE D'OCS. J'essayais de me mettre en phase avec le
"producteur" officiel (LO44) et de faire dans la catégorie "loufoque", ce
qui de mémoire n'avait jamais été abordé auparavant dans ce type de softs.
J'ai eu plus d'une cinquantaine de pseudos de RTELiens dans mon carnet
d'adresses. J'ai pu remettre la main sur ma liste de l'époque. On y trouve :
2C MIEUX QU'UNE, ACHA, AP II, APPLE 44, APPLE76, APPLE MOI, APPLEMANIA,
ARAGORN64, ARAGORN GS, ARN, ASTRABAN, BABAR DE ST CYR, BILBO BILOBA,
BYTLEJUICE, CETOINE, CGS, COPPERFIELD, DALAT, DARDEVIL, DEAD MAN, DIABOLIK /
EDDIE SLAYER, DISKBURNER, DOUME, EDDIE HAWK / CROCKY DISK, FLINT,
GANDALF-APPLE, GEGEAPPLE2, GODFATHER, GOLDEN CLUB (ABONNEMENT), JACK, LO44,
LOGO, LOOCKHEED (ABONNEMENT BLACK CHEST), MAGMA, MANUTEL, MAX HEADROOM,
MQJDS, MVCAMILLO, NEWSRUNNER, NIBBLE, NINJA, P'TIT DUC, PEV16, RAT CORP.,
RJP, SMOOTHY, STAR42, THE JOKERSOFT, THE LUCK JIM, THE MONZ, THE WARGAMER,
THE WHITE MAN, THRY2, TRANSWARP, WOLVIE, ZARATHOUSTRA.
Tu sembles avoir été toujours un peu réticent vis-à-vis du
cracking, pourquoi ? Est-ce par conviction profonde ? Ou bien n'était-ce
dû qu'à un manque d'opportunité (impossibilité d'avoir des originaux par
exemple)?
Outre l'aspect pratique (avoir des originaux sous la main, ce qui n'était
pas mon cas), ce type d'activité ne me branchait pas et d'ailleurs dans la
mesure où l'Underground était largement approvisionné en softs crackés, il
n'était pas utile d'avoir de nouveaux intervenants sur ce créneau déjà bien
pourvu. Plus je voyais ce qu'il se passait dans la communauté du cracking
(vanité, guerres, ...) et plus cela me confortait dans la justesse de mon
choix.
Ceci dit, j'appréciais d'avoir accès à tous ces softs et j'en étais
reconnaissant à ceux qui avaient fait sauter ces protections.
J'étais par ailleurs pendant un temps membre du Black Chest sous un autre
pseudo (Brian Boru) et j'avais aussi acheté à Godfather quelques-uns de ses
cours pour me déniaiser sur le sujet sans d'autres convictions que cela. Je
ne me souviens plus pourquoi mais j'utilisais un autre pseudo (Solomon Kane)
dans les quelques échanges de courriers que j'ai eu avec Godfather.
Avais-tu des contacts directs avec certains crackers de
l'époque?
Certains "proches" correspondants réguliers (Eddie Hawk, LoGo, The White
Man) se sont mis au cracking vers le fin de l'Underground Apple II mais je
n'abordais pas ces problématiques avec eux. J'étais juste navré de les voir
ensuite se déchirer comme leurs prédécesseurs plutôt que d'être
constructifs.
Avais-tu des "idoles" dans le milieu?
"Idoles" n'est pas vraiment le mot.
Mais comme beaucoup, j'ai toujours été impressionné par la qualité des
productions signées ACS. Vitesse (ACS DOS et autres fast boots), animations
inédites (faites mains), musiques... une belle harmonie qui témoignait de la
maîtrise et de la complémentarité des membres de l'équipe dijonnaise.
J'enviais aussi la programmation signée Patchman. Il avait écrit des
bibliothèques de macros et ses programmes ne ressemblaient plus trop à du
code 6502 mais à un autre langage. C'était en tout cas de belles
réalisations (Mac Joy, Excel Displayer DHGR, Excel Boot, ses Bidouillages
Mode d'Emploi, sa série P.L.U.S., ...)
Sinon, un regret, c'est de ne pas m'être davantage rapproché de The
Jokersoft à l'époque. J'aimais bien ses séries et les quelques messages que
j'ai pu échanger avec lui me laissaient penser que c'était un gars bien.
Quels étaient les personnalités (underground ou pas)
officiant sur Apple II que tu respectais le plus et pourquoi?
En dehors de l'Underground, la liste serait trop longue à détailler : il y a
eu tellement de contributeurs importants.
Si je devais vraiment faire un choix personnel, je citerais évidemment Woz
et dans le désordre : Bill Budge (pour ses routines graphiques et ses
interfaces), Jim Sather (gourou hardware), les outils de Glen Bredon et Paul
Lutus, les ingénieurs de chez Applied Engineering, Don Fudge, Beagle Bros,
Bob Bishop, Randy Hyde, ...
Pour les français, j'étais surtout admiratif de l'étendu des connaissances
du monde Apple II de Jean-Yves Bourdin (revue POM'S) et je lisais toujours
sa rubrique "Apple II for ever" avec avidité.
À l'inverse, avais-tu quelques "têtes de Turc" en
particulier?
<rien à dire>
Te sentais-tu concerné par les bagarres de l'époque
(Godfather vs TBT par exemple, Godfather vs Mister Z, etc.)?
Ces "guerres" étaient à mon sens la manifestation des travers de
l'adolescence ou de la fin de l'adolescence dans beaucoup de cas. Cela ne
m'intéressait pas le moins du monde, pour ne pas dire plus, surtout quand je
me baladais sur RTEL et que je devais attendre que mon minitel finisse
d'afficher une page d'injures pour découvrir (avec soulagement et plaisir)
l'annonce d'une production sur la page suivante.
Même à l'époque (fin des années 80), quand mon collègue de groupe, Eddie
Hawk, avait essayé de me faire participer à une confrontation avec un autre
gars prompt aux dérapages (pseudo AP II pour ceux qui s'en souviennent),
j'avais décliné cette "invitation", ce qu'il avait mal digéré.
Je n'envisageais l'Apple II qu'en tant que plaisir et non comme une source
de conflits stériles. Il y avait déjà les études pour me pourrir la vie...
Bref, je suis mal placé pour te parler des différentes "bagarres"
virtuelles. Sauf une : Godfather vs TBT. D'ailleurs, il faudrait plutôt
parler de confrontation GDF vs Loockheed. Et encore relativiser l'engagement
de GDF sur cette voie.
J'ai quelques informations à ce sujet qui me viennent de Loockheed :
En fait, c'est Loockheed qui a déclenché cela alors qu'il n'avait aucun
motif valable contre Godfather. Les autres membres du Brain Trust n'ont fait
que suivre la teigne de service. L'explication est assez navrante : à cette
époque, les softs Apple II devenaient rares (contexte de la gamme IIe/IIc
mourante aux USA) et de ce fait les déplombeurs commençaient à être "au
chômage". Pour s'occuper, Loockheed n'a rien trouvé de mieux que de
déclencher volontairement les hostilités. Pour reprendre sa formule : "J'avais
rien contre GDF perso mais je pensais qu'un bon ramdam nous ferait tous
rigoler. <...> Je crois qu'à l'époque ce fut ma seule stratégie
consciente. <...> Le reste du TBT étant des gens plutôt biens dans
leurs baskets <...>"
A mon sens, GDF a eu une attitude saine : il est inutile de rentrer dans le
jeu d'un sociopathe - ça ne fait que le conforter et lui donner une
importance qu'il n'a pas. GDF l'a ignoré et a avancé sur d'autres projets.
Avec le recul, qu'en penses-tu?
Il y a dans ce bas monde des gens pour qui la justification de leur
existence se limite à la confrontation avec autrui. J'ai croisé le chemin de
plusieurs d'entre eux.
Loockheed fait partie de cette catégorie de personnes en guerre permanente
avec son entourage. C'est une boule de haine incapable de faire quelque
chose de constructif. À l'époque, les autres membres du Brain Trust le
décrivaient comme une personne ne pouvant pas avoir une discussion avec
quelqu'un sur RTEL sans finir par cracher sur son minitel. 25 ans plus tard,
son comportement n'a pas évolué d'un iota. Alors que le poids des ans est
censé apporter recul, sagesse et maturité, il est resté un concentré de
fiel, une personne pour qui l'activité préférée consiste à "faire
la guerre pour s'amuser et foutre le bordel" (dixit).
Une citation caractéristique de l'individu : "Quant
au respect, je me bornerai à citer ce philosophe inconnu : "La société,
c'est l'organisation rationnelle quoi qu'inconsciente du mépris des uns
envers les autres". Méditez bien ça chers amis? ou ruminez le?"
Je détaille :
Il m'a contacté en 2006 sur internet et nous avons échangé des messages
pendant environ trois semaines en vue de faire une interview de ses
activités de cracker.
Il est apparu qu'il n'a pas compris le principe de ce type d'exercice, ce
qui la fout mal pour une personne dont le discours tourne principalement
autour de son nombril et de sa soi-disant intelligence.
Il s'est avéré que le personnage, dénué de tout humour (sauf si vous
considérez que le pire de Stéphane Guillon s'apparente à de l'humour), est
incapable de concevoir une discussion autrement que comme une joute. De
plus, alors que j'attendais des anecdotes sur l'Underground, ce qui donne sa
saveur à ces tranches de vie, j'ai eu droit à un bric à brac de citations
rébarbatives "dignes" d'un lycéen en manque d'inspiration et recopiant ses
annales bac de philosophie. Il a finalement dû se rendre à l'évidence : son
texte, pénible et lourdingue à la lecture, faisait surtout ressortir son
incapacité à avoir une vie sociale normale, et comme un adolescent, il s'est
barré en claquant la porte.
J'ai eu droit à ce discours de sa part : "Alors,
mon conseil, si tu veux faire vivre ton site, déclenche une bonne guerre
sémantique sur qui pisse le plus loin, et là tu vas voir qu'on va bien
rigoler comme dans le bon vieux temps". Son "intelligence" avait
omis de lui souffler à l'oreille qu'à l'approche de la quarantaine, on a
d'autres préoccupations...
Ce que je pense dans le cas de Godfather ? Pas simple...
Avoir un fils en bas âge permet de redécouvrir les contes pour enfants.
Il y en a un qui illustre assez bien sa situation je trouve. Il s'agit d'un
conte africain "le secret du bonheur", avec le père, son fils et leur âne.
Facilement trouvable sur le net. Les faits : "peu importe ce que tu fais, il
y aura toujours quelqu'un pour y trouver à redire". La morale : "Fais ce qui
te plait (sans tenir compte des commentaires des autres), et tu seras
heureux".
J'insiste sur Godfather (qui est à mon sens un des
personnages clef de l'Underground de l'époque) car au travers les
différents articles sur ton site, on a l'impression que ta position a plus
ou moins évolué vis-à-vis de lui et de son "oeuvre" avec le temps. Peux-tu
donner ton sentiment actuel?
Tu me demandes de porter un jugement ? Soit ! Mais je précise qu'il ne
s'agit que de mon ressenti personnel, aussi merci de ne le prendre qu'en
tant que tel. Quelques mots donc sur ce que je pense de GDF et son principal
détracteur avec le recul, le tout en deux axes.
L'axe de l'héritage Underground Apple II (axe qui concerne surtout les
archivistes/amateurs comme moi) :
Je constate juste que les années passent et les individus physiques
s'effacent au profit de ce qu'ils ont produit. Ce qui caractérise le plus
les "traces" que laissera Loockheed, c'est une photo digitalisée de lui, le
bras levé et le majeur tendu, ceci éclipsant même les quelques cracks très
techniques qu'il avait réalisés. Face aux productions de Godfather (textes
et initiatives), Loockheed n'est qu'une anecdote ne pesant pas bien lourd
sur la balance de l'intérêt. L'aspect "démarche commerciale" de la fin de
GDF ne change rien à la donne. Il a voulu se faire de l'argent de poche, et
après ? C'était contre un travail rédactionnel orienté partage de
connaissances même si les outils n'étaient pas nécessairement de lui. Il
s'agit d'un détail mineur au regard de ses contributions à l'Underground.
L'axe sociologique :
Notre société libertaire n'est pas forcément adaptée pour les individus
incapables de se structurer.
Quand j'entends l'adolescent Loockheed faire l'apologie de la "guerre", je
lui aurais souhaité une éducation d'une société tournée entièrement vers
cela (et pas la guerre façon "enfantillages").
Chez les Lacédémoniens (Spartiates), à l'époque de l'application de la
Constitution du législateur Lycurgue, on ne prenait pas l'éducation des
adolescents à la légère. Lycurgue, "remarquant qu'un très grand orgueil est
infus chez les gens de cet âge, que la violence est extrêmement abondante et
que les désirs de plaisirs sont installés avec le plus de force, avait
imposé des tâches en très grand nombre et s'était arrangé pour qu'ils
manquent en très grande partie de loisirs. Il établit également, que si
quelqu'un se dérobait à cela, il n'obtiendrait plus rien des bonnes
choses... En outre, voulant infuser fortement en eux la réserve, il leur
enjoignit de garder leurs deux mains sous leur manteau mêmes dans les rues,
de marcher en silence, de ne pas jeter les yeux nulle part et de ne regarder
que ce qui était à leurs pieds".
Loockheed, ça lui aurait fait du bien de s'occuper utilement et d'apprendre
à fermer sa gueule. Ce type est si aigri et si désoeuvré que, plus de 4 ans
après (oui 4 ans !), il en était encore à venir cracher son venin sous forme
d'insultes sur le livre d'or de mon site. Pathétique...
Sur les dernières productions Underground parues, tu étais un
personnage incontournable, en avais-tu conscience à l'époque?
Quand il ne reste presque plus personne dans un troquet, il est sur que les
derniers encore présents à lever le coude se font plus facilement
remarquer...
Je n'ai pas souvenir d'avoir vu un seul "Big shit" ou grief à
ton encontre, t'entendais-tu bien avec tout le monde systématiquement ?
Est-ce dû à une certaine distance de ta part?
La plupart des échanges houleux étaient déclenchée par des histoires d'ego,
caractéristique surtout développée chez les déplombeurs. Or je ne les
fréquentais pas ou peu. Quand quelqu'un se contente d'aider les autres et
d'essayer de faire une production sans attendre quelque chose en retour ni
"s'afficher", je vois difficilement ce qu'on pourrait lui reprocher.
Après l'aspect humain, l'aspect technique maintenant : quels
étaient tes outils favoris?
Merlin pour la programmation.
Sourceror pour la reconstitution de sources.
Shrinkit pour le gestionnaire de fichier ProDOS, COPY II+ 5.5 pour la partie
DOS.
Extasie, Dazzle Draw pour le dessin en DHGR.
Blazzing Paddles pour le dessin HGR.
Electric Duet pour la musique.
Locksmith Fast Copy 6 pour le swapping.
Disk Fixer et COPY II+ pour le hack des floppy disks.
Plein d'autres que j'utilisais de manière occasionnelle.
Pour le reste, des outils personnels.
Je suis resté attaché très longtemps au DOS 3.3 et à ses dérivés. Ce n'est
que lorsque j'ai fait l'acquisition de matériel de stockage de masse que je
me suis intéressé au ProDOS.
En dehors du développement spécifique de Muryaden (dont nous
reparlerons par la suite) passais-tu beaucoup de temps sur ton Apple II?
J'ai effectivement passé pas mal de temps en bidouillages, réussis ou pas.
Mais comme les autres djeuns, je ne faisais pas que cela non plus. Lire, les
sorties ciné, etc.
Il n'empêche que mon père s'est au moins deux fois interrogé sur la
nécessité que j'aille consulter un psycho-machin à cette époque. Sur le
coup, ça m'a bien faire rire. Avec le recul, on mesure l'importance du fossé
qui peut exister d'une génération à l'autre. Mon père étant allergique à
tout objet technologique, y compris dans les années 80 au maniement d'un
magnétoscope ! Son hobby, c'est le jardinage... J'ai été scié quand ma mère
m'a appris récemment qu'il daignait à présent s'asseoir derrière un
ordinateur pour consulter ses actions en bourse ! ! ! Comme quoi il n'y a
pas d'âge pour changer... à moins que la situation boursière soit à ce point
désastreuse !
Sur la fin, n'as-tu pas été tenté de passer au IIGS comme
certains, pour prolonger l'aventure Apple II un peu plus longtemps ?
Pourquoi cela ne s'est-il pas fait?
Le IIGS coûtait toujours assez cher quand plusieurs de mes contacts ont
effectué leur migration. Je ne les ai pas suivi. Je me souviens que LoGo
m'avait encouragé à acheter un UC de GS (je dois encore avoir sa lettre de
l'époque). Plus tard, Zardos m'a donné un exemplaire du IIGS Firmware
Reference et j'ai acheté d'occasion les 3 volumes du IIGS toolbox reference.
Le fait est que cette lecture m'a cassé les pieds et je n'ai tout simplement
pas suffisamment accroché. Me retrouver avec une boite à outils livrée avec
la machine alors que j'avais pris l'habitude de coder moi-même, peut-être
ai-je eu le sentiment de perdre ma liberté.
Sur quelle machine es-tu finalement passé ensuite et à quelle
époque?
Au milieu des années 90, j'en ai eu marre d'utiliser ma carte Appletell et
mon modem Digitelec pour les connexions aux serveurs de services Télétel. Le
débit n'était plus supportable. Tout en conservant mes machines Apple II,
j'ai investi dans un PC sous Windows 95. En 1996, j'avais un modem
suffisamment performant pour lire les newsgroups Apple II et faire des
téléchargements de disques images. Et la machine me permettait de faire
joujou avec les émulateurs Apple II disponibles.
Puis j'ai upgradé vers Windows 98SE. Mon PC a évolué en fonction de mes
achats de pièces détachées chez les chinois en face du Surcouf de Daumesnil
dans le 12ème arrondissement parisien. Il y a eu des va et vient
Windows/Linux (à partir de la Mandrakelinux 5.1) en fonction des
compatibilités hardware et de mon humeur, pour finir avec des disques durs
extractibles en tiroir. J'ai gardé cette machine très longtemps.
En 2007, je me suis payé un PC HP pour le boulot et j'y ai ajouté un tiroir
HD pour switcher entre le Vista d'origine et une distribution Mandriva. La
dernière installée est la 2010.1. Je n'utilise quasiment plus Vista, à part
quand j'ai un scan à faire. Par contre j'emploie linux pour effectuer
quelques développements et tests en java quand j'ai le temps.
Ce n'est qu'en 2008 ( ?) que j'ai acheté mon 1er imac 20" intel alu. Pour
répondre aux besoins de ma compagne, je lui ai laissé pour m'en acheter un
autre en 2009. Pour le nomadisme et les vacances, mon eeepc 901 (2008 ?)
fait toujours l'affaire.
Bref, du moment que la machine répond au besoin, je me fous de l'OS qui la
fait tourner. Je ne suis pas le dévot d'une chapelle en particulier.
D'ailleurs, cette polyvalence m'a été utile.
As-tu connu depuis, une passion pour une autre machine de
l'ampleur de celle éprouvée pour l'Apple II?
Clairement non. Mais je dois aussi reconnaître que c'est la seule pour
laquelle je me sois autant investi. Elle a un côté "taille humaine" et sa
prise en main s'en trouve autrement plus facilitée qu'avec un monstre
moderne.
As-tu été actif dans un autre Underground quelconque?
<rien à dire>
La saga Muryaden
NDR : Jean-Marc a passé
beaucoup de temps à détailler sur son site la genèse et le développement
de Muryaden. J'ai toutefois voulu
revenir avec lui sur certains points.
Quand tu as commencé le développement du premier Muryaden,
avais-tu une idée de la complexité et de l'ampleur de la tâche à
accomplir?
Mon ami Elrik et moi-même avons commencé à faire séparément des ébauches de
jeux en 1987. Mais le véritable début de l'association a débuté à l'été
1988.
Muryaden I a été produit de juillet 1988 à mi 1989.
Muryaden II a demandé plus de temps : de juillet 1989 à fin 1991.
A la base, il ne s'agissait que d'un petit projet de vacances qui aurait dû
nous occuper qu'un seul été. Il n'y a pas eu de réflexion préalable et on
s'est lancé dans cette collaboration pensant qu'avec la répartition des
tâches connues (lui le fonctionnel des combats et leur implémentation en
BASIC et moi l'aspect technique de l'ensemble en langage machine), cette
complémentarité (et donc quasi autonomie) aurait permis d'avancer plus vite
qu'en solo. Or il y a un certain nombres d'éléments annexes qu'il a bien
fallu mettre au point avant de commencer la réalisation proprement dite, à
savoir le scénario, le graphisme, la cartographie, les caractéristiques
chiffrées du monde, ... Et tout cela est consommateur de temps, surtout que
nous n'avions pas d'outils dédiés pour cette phase d'informatisation du
background.
Pour Muryaden I, on a fait l'impasse sur des points qu'on aurait pourtant
voulu avoir tout de suite mais nous avons jugé plus raisonnable de les
implémenter ultérieurement dans un autre jeu quand nous aurions réussi à
accoucher du 1er volet. Ceci concerne typiquement des sprites dédiés, les
villes pouvaient s'explorer comme l'extérieur et les donjons, ...
Donc pour répondre à ta question, ce n'est qu'aux pieds de la montagne que
nous avons pu nous rendre compte de la tâche à accomplir.
As-tu envisagé à un moment (même vaguement) pouvoir
commercialiser le jeu ? Etait-ce un des rêves de départ?
A cette époque (1988), le marché de l'Apple II était déjà mort en France
depuis plusieurs années et outre Atlantique, il y avait déjà une raréfaction
des productions des majors du domaine sur cette plateforme. L'objectif
était uniquement de s'amuser sans aucune prétention commerciale.
Muryaden II est (logiquement) plus ambitieux que le premier,
qu'est ce qui a principalement changé dans la façon d'appréhender le
projet entre le premier et celui-ci?
Une première expérience est forcément enrichissante quand on doit remettre
les couverts. Moins de temps perdu à tergiverser sur telle ou telle
caractéristique. Des choix avaient déjà été pris et s'étaient avérés
payants, ce qui nous faisait gagner du temps. Il y a eu moins
d'allers/retours sur l'aspect organisationnel. Les décisions étaient prises
plus rapidement. Le système d'exploitation était déjà OK (RDOS trafiqué).
Depuis Muryaden I, je maîtrisais mieux le langage machine et l'assembleur
Merlin.
Entre le début de la réalisation du 1er volet et son achèvement, j'ai
énormément gonflé ma liste de contacts, ce qui m'a permis déjà de "recruter"
un graphiste pour le 2nd volet : Diabolik / Eddie Slayer. Nous étions en
contact pour des échanges de softs et il s'est spontanément proposé. La
conception d'outils pour les sprites a permis d'étendre la richesse visuelle
en un temps "décent". Diabolik a quitté la scène Apple II assez rapidement,
suite à l'achat d'un Atari 520ST (puis d'un Amiga). Mais nous avons eu la
chance qu'il ait bien voulu continuer à nous aider après son acquisition (il
avait gardé son Apple II et quelques softs de cette plateforme). J'ai
néanmoins dû reprendre une partie du travail créatif par la suite mais son
apport au final a été plus que déterminant.
Un travail pénible a consisté à faire le tri dans tout ce que nous avions à
disposition (surtout pour les sprites) pour ne garder que le nécessaire, en
gardant à l'esprit que les sprites conservés devraient tenir en mémoire.
Malgré cela, le projet ayant pris de l'ampleur, il a fallu accepter l'idée
de faire un jeu nécessitant 128k (contre 48k pour Muryaden I). Les banks et
la ram auxiliaire ont été utilisés pour stocker tout ce supplément de datas.
À propos du développement, tu insistes sur le fait que cette
expérience t'a permis d'apprendre à finir un projet coûte que coûte,
doit-on en déduire qu'il a fallu parfois s'accrocher et se forcer à aller
de l'avant ? N'as-tu jamais été découragé?
Elrik bûchait à son école polytechnique et sur la 2nde année (fin 90 à fin
91), j'étais le seul à faire avancer le projet. J'ai effectué mon service
militaire pendant cette période là (à l'époque où le service durait un an et
était obligatoire). Mon Apple II se trouvait à Rueil-Malmaison dans les
Hauts-de-Seine et moi en Allemagne, en pleine forêt noire. Ce n'est que lors
de mes permissions (c'est à dire un à deux week-end max par mois) que je me
consacrais à Muryaden II. Après un trajet ferroviaire de plus de 7 heures
(rien que pour un aller simple) dans un train militaire aux wagons
surchargés en nuages de tabac (l'enfer pour un non fumeur comme moi), je
m'enfermais dans ma chambre pour ne faire que la saisie cartographique avec
les outils que j'avais développés. J'en ai bavé, à raison d'une carte par
week-end en bossant une partie de la nuit. Puis il y a eu la phase de
tests...
Plus personne n'attendait le 2nd volet et j'ai dû cravacher dur pour ficeler
le projet : comme souvent, ce sont les 10 % qui restent qui sont les plus
difficiles à finaliser. Elrik ne risquait pas de m'aider puisqu'en 1991, il
avait choisi de bénéficier d'une offre d'Apple qui vendait des mac LC en
effectuant une remise en échange de la reprise des anciennes machines. Il
n'avait plus son Apple IIe. Il croyait que la carte d'émulation Apple IIe
pour mac allait être disponible rapidement, mais ça n'a pas été le cas.
Oui, j'ai eu des moments de grandes solitudes lors des tests, quand le jeu
se plantait après 2 heures d'utilisation lors d'un combat, sans avoir de
piste à suivre ni le soutien du responsable du code BASIC.
Je pense qu'Elrik a été étonné quand je lui ai annoncé que je l'avais fini.
Probablement parce qu'il n'y croyait plus trop lui-même et ne savait pas le
temps que j'avais investi dessus. Et aussi parce qu'il savait qu'il devait
rester des bogues dans les combats, bogues qu'il n'avait pas l'intention de
corriger car le nombre de cas de tests était beaucoup trop important pour
effectuer toutes les vérifications.
Avec le recul, que penses-tu du résultat ? Y'aurait-il des
choses que tu ferais différemment?
Pour une production non commerciale, Muryaden II est de bonne facture je
trouve. J'ai vu des jeux commerciaux moins biens.
Le problème est plus lié à la plateforme et surtout au langage BASIC. Il est
clair par exemple qu'avoir un langage gérant des variables globales et
locales aurait permis d'éviter des effets de bord. Je pense qu'Elrik a dû un
peu se noyer dans ses routines. Il faut voir la tête de certaines de ses
fonctions DEF FN ! On se retrouve vite limité par la machine dès que le
projet devient un peu complexe. Et puis sans débogueur sérieux, on n'est pas
aidé.
Elrik ne maîtrisait pas non plus certains aspects du BASIC. Par exemple, au
début nous rencontrions des OUT OF MEMORY ERROR et Elrik prétextait que
c'était dû à la gestion des variables par la ROM. Or en traçant son
programme BASIC principal, je me suis rendu compte que certains
sous-programmes appelés par un GOSUB ne finissaient pas par un RETURN. Ils
repartaient vers la boucle principale via un GOTO dans certains cas de
figure. Evidemment l'adresse de retour du GOSUB étant mémorisée en pile, au
bout d'un certain temps, en fonction des situations de combat et des choix
du joueur, la pile atteignait sa limite et le programme plantait.
Il aurait fallu un langage plus structuré (et un esprit plus rigoureux). Il
en existait quelques-uns mais du coup, on n'aurait pas eu suffisamment de
mémoire (runtime oblige) et contrairement au BASIC APPLESOFT, on n'aurait
pas eu connaissance de l'utilisation de la page zéro.
As-tu le sentiment qu'il a manqué quelque(s) chose(s) au
projet pour véritablement aboutir?
Plus de temps libre et davantage de testeurs, cela ne fait aucun doute.
Est-ce que tu n'as pas le regret d'y avoir consacré trop de
temps, temps qui aurait pu être utilisé pour autre chose à l'époque?
Non, car je n'avais pas trop la volonté de m'investir dans autre chose à
l'époque. Quand quelque chose te plait, tu ne te poses pas ce genre de
question.
Muryaden III (ou un autre jeu) était-il dans les cartons?
Après Muryaden II, était prévu Brazil, un autre jeu de rôle (toujours), mais
en DHGR cette fois. Il me manquait juste un graphiste et le remplaçant
d'Elrik. Autant dire mission impossible en 1992. J'avais essayé de trouver
un graphiste via une production : "Brazil Help Disk" contenant deux éditeurs
DHGR de sprites, un pour le mode 560x192 en monochrome et un pour le mode
140x192 en 16 couleurs. Mais ce n'était plus une compétence qui courrait les
rues... tout au moins sur cette plateforme désertée.
L'univers de Muryaden (et tu le dis toi-même), était un rejet
du manichéisme bien pensant de la majorité des jeux de l'époque. As-tu
l'impression que ce phénomène a évolué dans le jeu vidéo qui a connu,
depuis, une véritable explosion auprès du grand public?
Les éditeurs naviguant dans les eaux tumultueuses du marché informatique
ludique ne sont pas des associations caritatives.
Pour qu'il y ait des ventes rendant l'opération rentable, il faut déjà un
marché conséquent. Partir sur un créneau restreint du fait de la nature du
scénario (sexe, déviance, violence, ...), c'est déjà un pari risqué qu'il
est difficile d'accepter quelque soit la situation (quand ce sont tes thunes
qui sont engagées ou quand tu as des comptes à rendre à ceux qui te confient
un budget).
Je comprends que les éditeurs n'aient pas envie de se mettre des
associations sur le dos et adoptent de ce fait des scénarios plus
classiques. Ça donne un créneau à l'Underground ;-)
Pour l'anecdote, dans Muryaden 1, après avoir terminé le jeu, il est
toujours possible de continuer à se balader. En cas de combat, la princesse
récupérée apparaît dans la liste des objets et ... est utilisable contre les
monstres. La drôlesse ne ménage pas sa peine, ni... sa personne. Je vous
épargne les commentaires salaces affichés par le jeu ! ! !
Joues-tu toujours aux jeux vidéo ? Quel est le dernier jeu
t'ayant particulièrement marqué?
Arf ! La dernière fois que j'ai vraiment joué (accroc), ça remonte à 1998. À
l'époque, j'avais fini "Total Annihilation" de Cavedog Entertainment, et ce
deux fois : dans le camp "Core" et dans le camp "Arm".
Le dernier jeu de rôle que j'ai fini, c'est... "Ultima III". Oui, quand j'ai
testé que ma version ProDOS fonctionnait correctement jusqu'au bout.
Et enfin, ton avis sur une série qui a grandement influencé
Muryaden : Ultima?
Une série légendaire ayant fait le bonheur de notre génération de joueurs
rôlistes. Ma remarque se limite aux versions sorties sur Apple II. Je n'ai
connu que les épisodes 1 à 5. Si j'avais eu le budget pour cela,
indéniablement ces titres auraient figuré parmi les rares softs que j'aurai
achetés. Le facteur "durée de vie" est un élément déterminant dans mes
choix.
Ton épisode fétiche ? Et que penses-tu de la piteuse fin de
la série avec un épisode 8 en demi-teinte et un 9 totalement raté?
J'ai surtout apprécié les épisodes 3 à 5, avec une préférence pour le
dernier. Bien plus tard, j'avais acheté un original d'Ultima 8 pour PC. Je
ne crois pas avoir joué plus d'une demi heure avec. J'avais l'impression de
me retrouver sur un jeu d'arcade ! Il a fini en don avec d'autres jeux en
boites sur le forum de Silicium.
Le collectionneur
Qu'est-ce qui t'a donné envie d'avoir une collection ? Et à
quel moment l'as-tu commencée?
Ce n'est pas quelque chose qui s'est décidé du jour au lendemain et
l'origine est multiple. Je n'ai plus le souvenir de la chronologie, aussi
voici quelques éléments :
L'optique programmation :
L'achat de certains matériels a été réalisé uniquement pour me permettre de
développer plus rapidement, une configuration de base ne me donnant pas
satisfaction en terme de performance. Par exemple, dans le cadre d'un achat
groupé chez Quality Computers (avec Jack), j'ai fait l'acquisition d'une zip
chip 8000 pour que l'assemblage de mes gros sources prenne moins de temps.
Cette puce était terrible question performance mais malheureusement elle
s'est mise à déconner à peu près 2 ans après. Dommage car je pense que la
zip chip était vraiment un produit extraordinaire.
Étant aussi confronté à la faible capacité des lecteurs 5,25", j'ai complété
ma configuration avec des lecteurs 3.5" et des disques durs.
Mon 1er disque dur a été un don. J'ai le souvenir qu'un gars de ma session
de DUT m'avait un jour donné un ProFile, matériel dont je ne connaissais
rien. Il m'avait ramené ce monstre en cours en m'affirmant qu'il provenait
d'une société se débarrassant de matériel n'étant plus utilisé. Je m'étais
dit "Wouah, avec une taille pareille, il doit avoir une capacité de stockage
de fou". Je suis alors parti à la recherche d'un contrôleur pour le
connecter à ma machine. Le seul que j'ai pu trouver m'a coûté 700 francs
français à l'époque (pour une carte complète en boite mais d'occasion). Ça
m'avait ennuyé de mettre autant pour une carte alors que j'avais obtenu le
ProFile gratuitement mais bon... Une fois connecté et booté, je n'en croyais
pas mes yeux : un monstre pareil ne proposait que 5 megas : j'étais vert
pour mes 700 francs ! ! ! Il est apparu que ce disque dur provenait de la
RATP et avait servi sous le système d'exploitation SOS. Je me suis rappelé
qu'effectivement pendant un temps quand je passais dans le grand Hall du RER
A à la station Auber, on pouvait voir dans des kiosques en forme de "bulles"
des Apple III avec ces ProFiles. Je me suis quand même servi de la "bête"
pendant plusieurs mois avant d'y renoncer pour cause de vacarme
insupportable.
Le matériel de rechange :
D'un voyage en Chine, mes parents m'avaient ramené un lot de cartes Apple II
achetées au Golden Computer Center d'Hong Kong. Parmi le lot, il y en avait
2 que je voulais absolument voir tourner : une carte RamWorks II 1 méga et
une contrefaçon de carte accélératrice Titan. La particularité de la
RamWorks II, c'est que les rams sont placées horizontalement, rendant la
carte très longue. Longue au point de ne pas tenir dans un boîtier d'Apple
IIe français car contrairement à la carte mère américaine, le slot 3 pour
l'extension mémoire n'est pas déplacé et en retrait sur la gauche. N'ayant
pas envie de scier mon boîtier, j'ai fini par acheter à un contact de RTEL
(pseudo Criss) une carte mère asiatique (clone d'une carte mère US). Ce
n'est que plus tard que j'ai acheté une RamWorks III qui, elle, avait les
rams placées verticalement pour pouvoir rentrer dans les machines
européennes.
Tout marchait nickel avec ma RamWorks II mais quand j'ai voulu essayer la
carte accélératrice avec ma carte mère FR, mon ordinateur n'a plus voulu
démarrer.
J'avais eu peur d'avoir bousillé ma machine avec ce clone de carte Titan
(d'ailleurs j'ai appris ensuite qu'il existait un modèle pour IIe et un
autre uniquement pour II/II+ et je ne savais pas à quel modèle correspondait
cette carte "pirate"). Ce n'est que le lendemain que mon ordinateur a bien
consenti à vouloir redémarrer. Cet épisode m'a marqué et c'est à partir de
ce jour que j'ai commencé à récupérer des UC pour pouvoir remplacer ma
machine courante si elle venait à rendre l'âme pour de bon. La Titan clonée,
quant à elle, est un jour partie en don (n'ayant plus jamais essayé de la
faire fonctionner).
L'achat de lots :
Pendant un temps, j'ai écumé les petites annonces sur le newsgroup
comp.sys.apple2.marketplace. Il m'est arrivé plusieurs fois d'acheter des
lots de cartes différentes alors qu'une seule m'intéressait. Je n'ai pas
cherché à revendre les autres qui sont donc restées dans ma collection.
Même genre de chose sur eBay. Il m'est arrivé plusieurs fois de "bidder" sur
une enchère d'un vendeur. Puis me disant qu'après tout, s'il avait d'autres
produits à vendre, je pouvais toujours essayer de les acheter, ça
m'éviterait ainsi de payer de nouveau des frais de port. Bien souvent ces
"bids" supplémentaires étaient pour le fun car le matériel ne m'intéressait
que moyennement. Au final, je me faisais "avoir" car je perdais l'enchère
qui m'intéressait et remportais celle voire celles sur lesquelles j'avais
misé sans plus de conviction que cela. Je me retrouvais encore avec du matos
sur les bras sans finalité précise.
Les achats compulsifs :
eBay peut devenir une drogue. J'y ai acheté pas mal de trucs dont en fait je
me foutais royalement. Au final, j'ai empilé plusieurs cartons de trucs qui
probablement ne me serviront jamais.
Depuis quelques années, il y a une frénésie autour de la
marque Apple et les prix flambent. Que penses-tu de cela?
Le matos Apple II n'a été que rarement bon marché. Il y a des cycles où les
prix atteignent des sommes ridicules à cause d'évènement comme la
disparition de Steve Jobs. Mais d'une manière générale, sur eBay, c'est un
peu aléatoire. Un accessoire peut atteindre plusieurs centaines de dollars
US un jour et partir pour moins de 100 la semaine suivante. Il n'y a pas
vraiment de règle. Ce qui est sûr, c'est que ce n'est pas la bonne période
pour faire ses emplettes. Par exemple, en ce moment, j'aurai du mal à
trouver un IIGS Woz Edition à 9,5 dollars US comme je l'ai fait en 2003 !
Maintenant qu'un type mette des milliers de dollars ou d'euros sur une
vieille machine, ça me dépasse. Tout comme me dépasse aussi de mettre des
sommes folles pour un sac à main ou une paire de chaussures ;-)
Mais bon, s'ils ont le pognon, grand bien leur fasse. Je suis juste curieux
de savoir ce qu'ils en font après (à part monter une page web avec des
photos du matériel et en gros le prix d'achat !).
Je me souviens avoir vu une photo sur ton site où l'on
découvrait que même le boîtier du compteur électrique servait de refuge à
un Apple II ! Ta collection est effectivement extrêmement conséquente,
comment gères-tu le "Wife Acceptance Factor"?
Je ne rencontre actuellement aucun souci de cette sorte car ma collection
Apple II n'est pas stockée sur le lieu de résidence de ma petite famille
mais sur mon "pied à terre" parisien.
Quelle est la pièce dont tu es le plus fier?
Je ne me suis jamais posé cette question sous cet aspect là, n'étant pas
vraiment collectionneur dans l'âme. Je glane au cas où cela me serve un
jour. J'ai plus une approche "outillage utile".
De toute façon, aujourd'hui, je préfère largement faire du DEV sous
émulateur, aussi une configuration Apple IIe sommaire est largement
suffisante pour les tâches de base (tests de softs ne fonctionnant pas sur
émulateur, création d'images disk, ...)
Bon, si tu veux une carte bien précise, je ne t'en donne qu'une. Tu vas
voir, ce n'est pas du vintage ! Ce qui me sert le plus, ce sont mes CFFA. Je
n'utilise presque pas le matériel qui coûte cher comme mes cartes SCSI par
exemple (RamFast et Apple High Speed SCSI).
Considères-tu tout cela comme un investissement?
Non pas du tout, il ne s'agit ni plus ni moins qu'un passe temps et rien
d'autre. Je ne me fais pas d'illusion : dans 10 ans, le hardware de base
(UC) ne fonctionnera plus (et contrairement à certains, je n'ai aucune
compétence pour effectuer les réparations). Les logiciels originaux sur
disquettes finiront par ne plus être lisibles.
J'en ai pour preuve la visite fin 2010 de Deny (ACS) qui est venu chez moi
emprunter du matériel et des logiciels originaux pour l'amusement de ses
convives de la FTA Wormz Party. Et bien sur les 4 à 5 machines que nous
avons testées en début de soirée, une seule fonctionnait encore correctement
(un GS). Et pourtant elles tournaient toutes encore sans souci il y a 4 ans.
Pour parler d'investissement, il faudrait qu'il y ait des acheteurs
potentiels intéressés. Or j'ai le sentiment qu'une très large majorité des
acheteurs d'aujourd'hui sont des personnes ayant connu cet univers au temps
de la vie commerciale de la machine. Et ce nombre de personnes va décroître
au fur et à mesure que la faucheuse fera sa moisson.
Serais-tu un jour capable de tout vendre ? Ou as-tu déjà dans
l'idée de transmettre le tout, un jour, à ton fils?
J'ai aujourd'hui un stock de cartes qui ne me sert à rien (genre cartes pour
imprimantes ou cartes "gadget" qu'il est amusant de tester une fois et qui,
dans le fond, n'ont pas de réelle utilité). Je ne sais pas trop ce que je
vais faire de tout ce bordel. Pour l'instant, ça reste dans mes cartons au
cas où un projet en nécessite l'usage.
Mon fils aura ses propres jeux et ce sera bien ainsi. À chaque génération
ses centres d'intérêts. Mon père n'a jamais capté pourquoi je passais du
temps devant un ordinateur et peut-être aurais-je aussi de l'incompréhension
sur les occupations futures de mon fiston.
Continues-tu à collectionner le matériel autour de l'Apple II
? Et si non, pourquoi?
Cela va faire plusieurs années que j'ai sérieusement levé le pied. Pour des
raisons budgétaires et parce que mettre de l'argent dans des achats dont je
ne vois pas la couleur (vols par des postiers, vols dans ma boite à lettre,
vendeurs indélicats), ça a tendance à me mettre en rogne.
Quelle est la pièce que tu rêves (ou aurais rêvé) d'avoir un
jour?
Je n'ai pas ce type de rêve matérialiste. Je rêve à du temps libre pour
pouvoir reprendre mes activités Apple II ! Un changement de travail pourrait
aussi régler la question, mais je n'ai pas encore trouvé.
Le site Web "Underground //e"
Pour avoir un ordre de grandeur, as-tu une idée des visites
mensuelles sur ton site ? De manière générale, te soucis-tu des stats?
Mon site est hébergé chez Free depuis des années mais je ne suis plus client
chez eux.
Un petit historique :
Mon compte Free date de l'époque où ce FAI proposait un accès gratuit 56kb
avec un service de messagerie et un peu d'espace d'hébergement. J'y avais
souscrit en remplacement de magic.fr qui était payant. L'espace libre alloué
par Free s'est agrandi avec le temps, et j'ai fini par devenir client chez
eux en optant pour leur offre ADSL. À cette époque, il y avait des infos de
stats disponibles. Je les regardais de temps en temps quand un pic du
compteur survenait, ceci afin de consulter les origines (pays) des
internautes visiteurs. J'ai quitté ce FAI pour le remercier d'avoir refusé
de me rembourser une période d'abonnement pendant laquelle l'ADSL a été
coupé de leur fait (ils l'avaient pourtant reconnu par écrit). Depuis ce
"bye bye", évidemment, il n'y a plus de stats.
Le site est toujours hébergé là-bas (le compte d'origine étant indépendant
de l'abonnement à l'ADSL). Et il le restera jusqu'à ce que leur politique
change et qu'ils me virent. J'ai évidemment un backup sur disque dur en cas
de dynamitage sans préavis de leur part.
Le nom en lui-même est suffisamment éloquent, pourquoi une si
grande place donnée à l'Underground?
C'est au travers de l'Underground Apple II que j'ai vécu le meilleur de ces
années là.
Les débuts datent de 2004, une raison particulière pour
l'avoir commencé à cette époque?
Depuis quelques années déjà, le matin, dès l'aube, à l'heure où blanchit la
campagne, il m'est difficile de ne pas voir les ravages du temps lorsque je
saisis mon rasoir. J'essaie de penser à autre chose qu'au triste spectacle
de ma gueule défaite renvoyé par mon miroir, aux problèmes de la veille et
aux emmerdes de la journée à venir. Après une séance de balayage mental,
façon Daniel Odier, j'essaie de me remémorer des moments agréables et dans
la catégorie "loisir et insouciance", l'Apple II et son underground figurent
en bonne place.
Il faudrait demander aux autres administrateurs de site, ce qui a motivé
leur démarche. Je ne serais pas étonné que d'autres te disent aussi qu'à un
moment de leur vie, ça fait du bien de se retourner un peu en arrière avant
de continuer son chemin. Demande donc à The Gog's et Deny pourquoi ils ont
organisé la FTA Wormz Party.
En 2004, il n'existait que très peu de sites francophones orientés
Underground Apple II. Parmi eux, il y avait celui de mon ami THRY2 alias The
Lonesome (Hey man, tu pourrais me passer de tes nouvelles de temps en temps
! !). Ce site apple2forever.free.fr n'est aujourd'hui plus en accès libre et
sa version www.apple2forever.net a disparu de la toile. J'ai eu envie moi
aussi de me faire un petit site dédié à notre passe-temps de jeunesse.
À l'époque, je travaillais pour un grand compte et je m'emmerdais ferme.
Ayant pas mal de temps libre, j'en ai profité pour apprendre rapidement un
peu de html et j'ai monté quelques pages pour tester les balises apprises.
C'est parti ainsi.
À la lecture, j'ai le sentiment personnel que le ton a changé
avec les années, il semble être devenu plus sérieux, moins "badin". En
as-tu conscience?
Je n'y ai pas porté attention. J'essaie juste d'étoffer davantage les
articles édités plutôt que de placer du texte brut récupéré sur des
disquettes de l'Underground. J'ai essayé de produire aussi quelques articles
personnels sur des points techniques. C'est forcément moins léger que des
éditions de bafouilles d'adolescents.
À propos des interviews d'anciens pirates, parmi ceux ayant
accepté, as-tu senti une réelle volonté de leur part de parler, voire même
un besoin ? Les égos sont-ils toujours aussi sur-dimensionnés, presque 30
ans après?
Tu connais le proverbe "l'appétit vient en mangeant", et bien ça a été la
même chose dans l'ensemble, serais-je tenté de dire. Il y a des égos
constructifs que j'apprécie (comme Lot) et des égos destructifs (Loockheed).
Ce dernier a été aussi pressé de partir qu'il l'était de parler ! Avec
Blacky, je me suis régalé. Un gars sympa, accessible et très humble. Sans
compter l'intérêt de son jeu.
Est-ce que le déroulement des interviews s'est avéré
laborieux (fallait-il leur tirer les vers du nez par exemple) ou s'est-il
effectué le plus simplement du monde?
Il y a eu de tout. Certains pas très loquaces et d'autres en verve. Le grand
écart aussi sur les durées. De deux semaines (si je me souviens bien) à plus
d'un an d'attente pour obtenir un questionnaire rempli (pour Mister Z dans
ce dernier cas). Il faut savoir être patient, ça finit par payer. Je crois
que mon engagement de confidentialité en a rassuré certains alors que
d'autres en avait rien à cirer. Pour Numéro 6, je t'avoue que j'ai été
embêté de laisser son nom. C'était sa volonté. J'ai dû lui demander
confirmation, ne comprenant pas trop ce que cela apportait. Avec le recul,
je pense par ailleurs que cela n'a pas dû plaire à une autre personne avec
qui j'avais des échanges réguliers et qui a fait le mort après cela. Mais
bon, au final, j'aime bien cette interview de notre prisonnier national et
je ne regrette pas.
Suite à la publication des interviews, j'ai eu des demandes d'adresses mails
(de crackers) au moins une dizaine de fois (principalement pour savoir
comment joindre Aldo Reset). Je les ai toutes rejetées.
Quant à ceux ayant refusé l'interview, quelles ont été les
raisons invoquées?
THE GOG'S :
Il y a à présent longtemps de cela, j'avais contacté The Gog's pour une
interview. Mais il venait d'être papa (pour la seconde fois je crois) et le
contexte ne s'y prêtait guère (fatigue, manque de temps - des trajets à
l'international il me semble de son côté). Je me demande même si je lui
avais envoyé la liste initiale de questions. Je ne crois pas. L'intérêt de
l'interview d'Olivier aurait surtout été son point de vue sur le piratage
des produits qu'il avait sorti avec son ancienne boite (celle de Nick GS),
les protections utilisées s'il y en avait et son attitude face à des
personnes distribuant ses logiciels en gardant à l'esprit qu'il avait
lui-même fait la même chose dans sa jeunesse.
Par ailleurs, comme il s'occupait de recrutement pour cette structure,
c'était aussi l'occasion de savoir s'il avait vu passer d'autres "anciens"
(et si avoir été un cracker pouvait être un plus, dans le sens où il faut
être d'avantage au courant des arcanes du système).
THE SOFTMAN :
Lorsque j'avais été contacté par The Softman, je m'étais dit qu'il y avait
là matière à écrire quelque chose d'intéressant à plus d'un titre. Tout
d'abord, alors que l'APP (Agence de Protection des Programmes) cherchait à
coincer des pirates, comment The Softman avait-il pu être contacté par
un/des journalistes et passer dans un reportage TV en train d'effectuer un
crack de Conan ? D'ailleurs ce "crack" faisait un peu
cinématographique (de mémoire).
J'aurais aimé aussi savoir s'il avait été inquiété par la suite. Ma question
vient du fait que j'avais aussi été contacté par un ancien du groupe Solex
Crack Band (également passé dans ce même reportage) et il m'avait indiqué
qu'une descente de police avait eu lieu le lendemain matin suivant la
diffusion. Et pour le Solex Crack Band, ça avait été un choc. Pour
l'anecdote, un des membres était issu d'un milieu "en vue" et voir débarquer
les flics à 6 heures du matin avait engendré quelques tensions familiales...
Sachant que The Softman était par la suite passé du côté des éditeurs,
est-ce que ce revirement avait été une conséquence de cela ? Et comment il
avait réagi suite à la diffusion d'une version crackée du soft qu'il avait
protégé pour cette société, crack incluant une galerie de clins d'oeil de
ses anciens "collègues" déplombeurs.
Mais The Softman était surtout motivé pour une reprise de contact avec un
autre cracker dont était parue l'interview. The Softman a fait le siège de
ma messagerie jusqu'à ce que l'intéressé rentre de congés et lui écrive à
l'adresse email qu'il m'avait demandé de "forwarder". Pendant la phase
d'attente, il avait accepté le principe de l'interview mais dès que son ami
l'ancien cracker lui a répondu, il n'avait plus le temps ni l'envie. Il a
néanmoins lancé une invitation à aller boire un verre ou pour un déjeuner
(je ne sais plus), offre que j'ai déclinée.
CHIP SELECT :
Certes, il y aurait eu déjà beaucoup de choses à dire sur ses activités de
déplombeurs mais ayant appris qu'il avait écrit un jeu pour Apple II (soft
non distribué), j'aurais essayé d'en savoir plus et éventuellement joindre à
l'interview des copies d'écrans. J'avais récupéré son nom et j'aurais pu
faire des recherches sur internet, mais j'ai traîné et ça ne s'est
finalement pas fait. De toute façon, il n'y avait aucune garantie que
l'exercice l'aurait intéressé. J'ai appris qu'il était présent à la FTA
Wormz Party, et j'espère que d'autres ont pu glaner des infos intéressantes.
Il faudrait demander à LoGo qui, je le sais, s'est entretenu avec lui.
Il existe une photo cool, que j'ai vu passée, avec 3 grands noms de la
déplombe d'alors. Pour l'anectode, à la belle époque, Apple avait fait
placarder une affiche d'appel à la dénonciation contre les pirates, procédé
anglo-saxon guère apprécié et accepté/suivi en France (la dénonciation était
rétribuée par une somme assez rondelette). Cette affiche, un ancien pirate
en avait piqué un exemplaire et me l'a montré lorsqu'il est venu me voir
chez moi. Depuis, l'envers de cette affiche s'est "enrichi" de la signature
d'un bon nombre d'anciens déplombeurs et hackers de l'époque, dont très
probablement Chip Select. Un collector Apple II rarissime ;-)
COPPERFIELD :
Quasiment tous les anciens pirates ont arrêté leurs activités. De ce fait,
leur point de vue sur le piratage n'est pas nécessairement en phase avec ce
qui se fait de nos jours. J'ai eu à quelques années d'écart deux salutations
de Copperfield, un ancien déplombeur du groupe The Brain Trust. À ce que
j'ai compris, il est toujours fortement impliqué dans un Underground. Mais
un contact erratique ne permet pas de construire une interview qui tienne la
route. Dommage, mais j'ai passé l'age de courir après les fantômes.
De toute façon, je ne suis plus intéressé par les interviews de crackers.
J'estime grosso modo en avoir fait le tour, le feu d'artifice final ayant eu
lieu avec Numéro 6.
Quand on lit le livre d'or, tous les intervenants (connus ou
moins connus) sont unanimes : cette époque était vraiment particulière et
tous en gardent un souvenir impérissable, beaucoup considérant même qu'ils
n'ont jamais retrouvé cela depuis. As-tu le même avis ? Et comment peux-tu
l'expliquer?
Nous avons fait cercle autour de la machine. La "fille" était attirante,
accessible, et nous nous sommes tous bien amusés. Aussi bien pour l'aspect
technique que pour les liens qui se sont créés entre les membres de cette
communauté. Nous avons vécu un bon moment qui restera gravé dans nos
mémoires jusqu'à ce que nous devenions gâteux.
Avec le recul dû à la réalisation de ton site (recherches,
interviews, découvertes, etc.), ton regard a-t'il changé sur certaines
choses ou certaines personnes de l'époque?
<rien à dire>
Aujourd'hui
Sur quelle machine officies-tu la plupart du temps?
Au Mans, sur imac.
À Levallois-Perret, sur PC Linux.
En déplacement/congés, sur eeePc Windows XP.
Au bureau, un mélange de Windows 7 (client) et Linux (serveurs).
Steve Jobs nous a quitté récemment, que penses-tu du
personnage?
Pas grand chose, n'étant pas un passionné de la rubrique "people" de
l'industrie informatique. La société Apple a un très faible impact sur ma
vie courante, aussi si je devais commencer à m'intéresser à toutes les
personnes (créateur, vendeur, idéologue) ayant travaillé sur les objets me
servant quotidiennement, Steve Jobs arriverait en fin de file.
J'accorde de l'importance à l'aspect comportemental des gens, et de ce côté
là, du peu que j'ai pu apercevoir (que ce soit sur le site folklore.org ou
par le téléfilm américain "Les Pirates de la Silicon Valley"), on ne peut
pas dire que Steve Jobs ait été un modèle du genre (pour rester poli).
Lui en veux-tu (comme certains) d'avoir abandonné l'Apple II
et tué dans l'oeuf le IIGS au profit du Macintosh?
Avant de voir la mort de l'Apple II, j'avais déjà eu droit à la mort d'Oric
avec "son coup de tonnerre dans un ciel
bleu". Il ne faut pas oublier non plus que Steve Jobs avait déjà
essayé de nous fourguer une autre machine avant le mac : son Lisa.
Je travaille dans le secteur de l'informatique et j'ai vu mourir la
quasi-totalité des projets sur lesquels j'ai travaillé. Aussi le "marche ou
crève" ne me fait plus réagir comme ce fut le cas à mes débuts. C'est devenu
une fatalité. La solution que j'ai adoptée depuis de nombreuses années déjà,
est de ne plus mettre toutes mes billes dans le même panier : la chute est
moins violente.
J'ai un mac, comme quoi je ne suis pas rancunier. Mais bon, je sais
pertinemment que c'est un produit à durée de vie limitée, Apple nous ayant
habitués au changement d'architecture, il n'y a pas de raison que le futur
déroge à ces habitudes.
Que penses-tu de l'orientation de la firme depuis le tournant
"iPod"?
Mon sentiment, c'est qu'aujourd'hui Apple est un fabricant de gadgets pour
geeks. Je n'ai pas l'usage de la quasi totalité de leurs produits aussi
l'orientation de cette société me laisse indifférent. Pour les produits qui
me sont utiles, je vais voir ailleurs...
Je constate juste que l'ambiance de type "secte" reste toujours ancrée chez
les aficionados. Mais maintenant que le gourou est parti voir si ses joujoux
ont trouvé un écho en Arallu (hyborien), on verra bien quelles tournures
prendront les choses. Vont-ils trouver une nouvelle icône à idolâtrer ? À
suivre dans les prochains épisodes.
Tu sembles un peu moins actif depuis quelques temps et moins
présent. Pourquoi un tel retrait?
Je passe une bonne partie de mes journées assis devant un écran d'ordinateur
pour mon boulot. Le soir et le week-end, j'ai envie de faire autre chose. Et
puis comme disait régulièrement un ancien cracker avec qui j'ai correspondu
quelques mois, je procrastine...
Que penses-tu de la communauté Apple II aujourd'hui ? Comment
la qualifierais-tu?
La communauté, je ne la vois que de loin et ça me plait ainsi. J'ai de plus
en plus tendance à m'isoler et à rechercher la tranquillité.
J'ai commencé à me désengager du forum Hackzapple à l'été 2010 et j'ai
complètement coupé les ponts en octobre 2010, date à laquelle j'ai remis ma
clef d'administrateur à Toinet. Je n'ai plus rien à voir avec ce forum même
si le logo d'Underground //e y figure encore. J'avais demandé à Toinet de
voir s'il était possible de mettre celui de Brutal Deluxe... mais
apparemment ça n'a pas encore été fait.
Je lis moins souvent les newsgroups Apple II mais apparemment, je ne dois
pas être le seul car il y a moins de messages qu'il fut un temps. Mais il
reste toujours des personnes très pointues comme David Empson et Michael J.
Mahon (pour n'en citer que deux), et il y a toujours quelque chose à
apprendre de leurs contributions.
Il m'arrive d'être enquiquiné quand un mec m'écrit pour me demander où
trouver un Apple II et si par le plus grand des hasards, je ne voudrais pas
lui en céder un. Mais même si ça me gave de répondre, je le fais quand même
et je l'envoie sur la baie. Il y a bien entendu des mecs genre "rapaces" et
là, je ne fais plus cet effort. J'imagine que si cette interview est publiée
en l'état, il y a bien quelques-unes de ces personnes qui vont se pointer en
me demandant de leur céder ma collection, ça ne fait pas un pli.
Cela me rappelle une anectode que m'a raconté un ancien cracker, il y a
quelques années de cela. Sa femme le menaçait de "conséquences irréparables"
s'il ne se débarrassait pas d'une pile d'Apple IIGS qui devait encombrer
leur demeure. Un type s'est "gentiment" proposé de l'aider à désencombrer
son appart. Pour rendre service quoi. Mais bon, le gars demandait en plus
que ce soit le donateur qui paie les frais de port car il estimait que
rendre service était une chose mais devoir payer en était une autre...
incompatible. Je pense qu'à la place de GS, il a dû se voir offrir un aller
simple pour Mykonos...
Il m'arrive d'aller sur Silicium pour y lire les forums. Mais j'avoue que
j'y vais surtout pour me détendre en espérant y trouver des messages de
pstriolo ou etms dit "la blatte", deux personnages hauts en couleur qui,
lorsqu'ils sont en forme, m'amusent beaucoup. J'aime leurs déconnades et
leur sens de l'humour.
Ca m'a aussi fait plaisir de lire ton site car les articles que tu publies
prouvent qu'il reste toujours des bidouilleurs sur cette machine et pas
uniquement des collectionneurs qui entassent.
Reste-t'il encore, à ton avis, des terrains "inexplorés" sur
Apple II (techniques de programmation peu ou pas utilisées, bidouilles
matérielles)?
<rien à dire>
Que penses-tu des périphériques ou cartes d'extension
"modernes" développés sur Apple II (comme la CFFA, le SPVHD, etc.)?
Il est sympa de voir fleurir ce type d'initiative. Néanmoins, en ce qui me
concerne, même si la carte ou le périphérique a une plus-value par rapport à
ce que j'ai déjà, j'attends d'avoir un retour d'acheteurs avant d'envisager
d'en faire l'acquisition.
Je me suis précipité pour mes deux dernières cartes pensant qu'il s'agissait
de produits prometteurs (pseudo-disk et iDisk). Or ma version de pseudo-disk
est une pré-série et elle est boguée - write error en mode ProDOS (c'est non
réparable : je l'avais envoyé en Bulgarie mais Vladitx n'a rien pu faire
pour moi) et la seconde carte a des contraintes qui ne me plaisent pas. À
plus de 100 euros pièce, ça donne à réfléchir.
Comme il s'agit de petites séries, la production est coûteuse. Et les
concepteurs étant des hobbyistes, les articles n'ont pas forcément la
maturité et la stabilité de cartes ayant subit des tests qualité poussés
propres au monde industriel. Il n'y a pas d'autres recours que le bon
vouloir du concepteur... Pour la carte pseudo-disk, Alex Freed indique qu'à
cause de la faible demande, il ne compte plus rien faire pour elle. Pour
l'iDisk, la production est arrêtée depuis juillet 2010.
Je note au passage que d'autres cartes ayant fait des vagues au moment de
leur sortie (il n'y a pourtant pas très longtemps), ne sont quasiment plus
évoquées dans les forums Apple II. Je pense à des cartes comme la "Carte
Blanche" d'AppleLogic ou le clone d'AppliCard d'Alex Freed. Il faudrait
demander à Antoine ce qu'il fait de sa "Carte Blanche" et ce qu'elle lui
apporte.
Quand j'ai vu les retards pour cause de bogues de la dernière CFFA3000, je
me suis dit que j'ai bien fait de jouer uniquement les spectateurs.
Tu es devenu papa relativement récemment, est-ce que cela a
changé quelque chose sur la perception que tu as de cette époque et de
l'Apple II?
Je ne vois pas de lien entre les deux. Il y a juste une incidence sur mes
activités. Avant j'avais un Apple IIe sur mon bureau au Mans. Depuis mon
déménagement, il est resté dans son carton ! Et les week-ends, je sors et
joue avec mon fils, quand je ne fais pas de menus travaux dans notre maison
sarthoise. Un autre temps, un autre plaisir, d'autres priorités.
Quel est ton meilleur souvenir en relation avec l'Apple II?
Le plaisir de lire mon courrier sur RTEL après avoir annoncé sur le forum
*APP la disponibilité d'une de mes productions.
Et ton plus grand regret?
D'avoir à chaque fois dû lâcher ma machine pour faire mes devoirs scolaires.
Tout cela pour des études pourries "à la Française", études qui ne m'ont
servi à rien.
Et pour finir, la question à laquelle tu ne pouvais échapper,
même si je vais la poser un peu différemment : contre quoi à l'époque,
aurais-tu échangé sans hésiter une soirée en tête à tête avec une superbe
fille?
La question que je posais aux crackers était orienté séduction, relation
homme-femme et libido. Aussi ma réponse sera en phase avec ces aspects. Et
la réponse est facile pour moi car, de ce côté là, je n'ai pas changé d'avis
depuis la bonne époque (de l'Apple II).
Une "superbe fille", ça ne m'intéresse pas. Je n'ai pas envie d'affronter
l'inévitable horde de séducteurs professionnels et autres collectionneurs de
nanas, devoir passer tout mon temps à jouer les romantiques/humoristes pour
conserver son attention et me battre en permanence pour la garder, ou
recevoir un jour en pleine poitrine une flèche du genre "je méritais mieux
que toi".
Des "superbes filles" à qui leur physique n'est pas monté à la tête, tu en
connais beaucoup ?
Annexe : le projet DotNib
NDR : On voit fleurir régulièrement l'idée d'un nouveau format d'image
disque prenant en compte la protection des disques commerciaux Apple II.
Deckard ayant lui-même initié un tel projet, j'ai profité de l'interview
pour faire le point avec lui sur cet aspect.
Tu as lancé il y a quelques temps le projet DotNib. Or, en
apparence tout du moins, depuis 2008, ce projet n'avance plus. Est-ce dû
principalement à un manque de temps ou te heurtes-tu à des problèmes
techniques?
La vocation première de DotNIB n'est pas de créer un nouveau format mais
d'upgrader SST pour ne plus avoir à manipuler des disquettes dans tous les
sens. L'idée est de sauvegarder l'image NIB sur un volume ProDOS,
typiquement sur un répertoire de mon disque dur. Pour mener à bien ce
projet, j'ai choisi la méthode "propre" de reconstitution du source avec les
commentaires et les labels EDD d'origine. Ce qui représente un gros boulot
de petites mains...
Un autre format est une possibilité d'extension future en exploitant
davantage les routines de EDD, mais ce n'était pas du tout dans mes
priorités. Je dois bien avoir plus de 250 idées de projets dans ma liste "TO
DO". DotNIB est dans le "pipe" avec une vingtaine d'autres comme lui qui ont
été commencés et qui se trouvent en stand by, effectivement suite à des
problèmes de disponibilités, l'Apple II étant en fin de chaîne de mes
priorités.
Pour la phase 1 du projet qui m'intéresse le plus, il n'y a pas d'obstacle
technique. J'ai déjà décortiqué le plus gros de SST, les sources de EDD sont
dispos en PDF et les routines d'écriture du NIB vont fortement ressembler à
celles utilisées pour FASTDSK, le principe restant le même.
En 2008 tu as diffusé une partie de ton travail à la demande
de certaines personnes qui voulaient reprendre (et accélérer) le
développement. Visiblement cela s'est terminé par un fiasco qui t'a,
semble-t'il, un peu marqué. Ajouté à cela le projet FastDSK qui a connu,
dans un autre registre, quelques mésaventures aussi. On te sent un petit
peu blasé et dépité par le manque de soutien. Te sens-tu un peu seul dans
ce travail de développement autour de l'Apple II?
Ma "politique" courante en matière de projets Apple II se résume à ceci : ne
pas me lancer dans un développement que je ne saurais pas terminer seul. Et
donc, je n'attends rien de personne, ce qui m'évite des désagréments comme
tu le dis.
Ça me rappelle, il y a quelques années de cela, un gars sur Silicium, qui
avait un projet de francisation du jeu de rôle Ultima II. Lui avait prévu de
traduire la doc et il comptait sur les autres pour effectuer les
modifications dans le jeu, n'ayant pas les compétences techniques pour le
faire. Autant dire que parti comme ça, un tel projet est automatiquement
voué à la mort.
Pour FASTDSK, la problématique est autre. Le projet, je l'ai réalisé. Mais
je suis tombé sur un type qui a organisé un concours et n'a pas jugé utile
de respecter ses engagements. Bref, du foutage de gueule. Je n'ai pas
apprécié et on ne m'y reprendra plus.
A présent, mes projets, je les fais avant tout pour moi, au même titre que
la lecture d'un bouquin. C'est un plaisir solitaire par nature.
Antoine Vignau avait lui aussi à un moment envisagé le même
genre de programme et de son côté aussi, cela semble être au point mort.
Y'aurait-il une véritable impossibilité technique ? Pourquoi ne pas avoir
envisagé un développement commun?
Antoine a le don d'ubiquité. Mais comme toi, je n'ai vu que son annonce de
projet de "vacances" (2010). Il me semble avoir lu quelque part que pour
lui, l'année 2011 serait une année orientée développement. Je crois qu'il a
beaucoup développé sa "comm" un peu partout (au niveau mondial et auprès
d'anciens "noms" de l'Apple II), ce qui est en soi aussi une bonne chose
pour un passe temps ne touchant au final qu'un nombre assez réduit de
personnes. Ce n'est pas moi qui vais lui jeter la pierre de ne pas avoir
fini ce qu'il avait prévu de faire !
À la base, c'était un projet commun, instancié sur le forum Hackzapple.com,
que j'aurais dû coordonner. Pas de pot (pour DotNIB), j'ai eu un changement
professionnel à 180 degrés peu de temps après, changement éjectant l'Apple
II à des distances lunaires. Il y a aussi eu des disfonctionnements divers,
comme des sources que JPL affirmait m'avoir envoyé par courriel depuis son
bureau et que je n'ai jamais reçus, l'impression que ma carte EDD et/ou mon
drive déconnait, ...
Bref, un coup d'épée dans l'eau et je continuerai en solo (donc sans
contrainte) quand j'aurai plus de temps libre.
Même si le nouveau format n'est pas adopté tout de suite par
un émulateur, ne serait-il pas tout de même intéressant de pouvoir
réécrire totalement une disquette physique "originale" à partir d'un
format image prenant en compte la protection?
La problématique est à mon sens de devoir justifier un gros effort de
développement pour un faible nombre de logiciels n'ayant pas été crackés ou
mal crackés à cause d'une protection retord. Avoir à disposition un soft
Apple II utilisable sous émulateur, ça n'intéresse déjà pas grand monde.
L'avoir dans un format conservant sa protection d'origine, encore moins ! Ça
se limite à quelques "puristes" en archéologie "Apple II". Ça intéressera
qui dans 20 ans d'étudier ces protections ?
Comme le dirait MJ Mahon, il est plus simple de cracker les softs qui ne
l'ont pas encore été quand un original protégé refait surface plutôt que de
vouloir le garder sous sa forme d'origine. Et puis tchao tchao aux 0,5 %
d'irréductibles. Qu'est ce que c'est que quelques softs perdus ?
Il me semble qu'il existe déjà des outils conservant une image complète
d'une disquette. Le fichier résultat occupe beaucoup de place et n'est pas
exploitable en l'état. Je crois me rappeler que Vladitx (Vladimir Ivanov de
l'équipe BootZero, un gourou du hardware) m'a parlé d'une de ses
réalisations faisant cela.
Avec une carte EDD et les listings qui étaient édités périodiquement par
l'éditeur Utilico Software, il est possible de faire la duplication d'un bon
paquet de softs. Idem pour le bit copier du package Locksmith. Il me semble
aussi que COPY II+ a une biblio de titres enregistrés avec les paramètres de
copie adaptés.
Que penses-tu des systèmes Kryoflux ou Catweasel?
Bienheureuses les personnes ayant le temps de tester tous les outils à
disposition. Ce n'est pas mon cas pour ces deux là.
Les vidéos "YouTube" de la Software Preservation Society + Kryoflux sont
sympas mais je n'ai pas vu ce qui était proposé comme format pour l'Apple
II.
Si tu connais un lien décrivant l'utilisation d'un contrôleur Catweasel pour
lire des disquettes Apple II protégées et ce qu'il est possible de faire
avec, je suis preneur.
Un grand merci à Jean-Marc pour le temps passé à répondre à toutes ces
questions.
Pour aller plus loin
Lire le conte africain Le
Secret du Bonheur.
Visiter le site
de Daniel Odier (à vos risques et périls...).
Retrouver l'interview
de Blacky sur ce site.
Découvrir l'Hyborien
(Arallu y signifiant "enfer").
Et tout savoir sur le Catweasel
(avec un programme permettant a priori de lire mais aussi d'écrire vers des
disquettes 5.25 Apple II).